Pourquoi certaines personnes se déplacent-elles pour mettre leur bulletin dans l’urne le jour d’une élection quand d’autres préfèrent aller à la piscine? À cette question primordiale pour la bonne marche de nos démocraties correspond une ample littérature scientifique où l’on trouve, parmi les résultats les plus solides et les plus stables, que le niveau d’études est positivement corrélé au fait de participer à un scrutin. En d’autres termes, que plus les gens sont diplômés, plus ils votent, et réciproquement.
L’explication conventionnelle de ce phénomène est qu’user ses fonds de culotte sur des bancs d’école ou d’amphis est un bon moyen d’acquérir les compétences civiques et les ressources cognitives nécessaires pour avoir un tant soit peu l’impression de saisir l’intérêt du processus démocratique.
Mais avec la révolution de la génétique comportementale amorcée depuis une bonne vingtaine d’années, cette explication «exogène» n’en finit plus de prendre du plomb dans l’aile. Les travaux se succèdent pour infirmer ces hypothèses et pour montrer le rôle déterminant des variations individuelles antérieures à la scolarisation –liées au QI, aux traits de personnalité ou encore au degré de socialisation parentale– qui interviennent autant dans la propension à gravir les échelons du système scolaire que dans celle d’avoir envie de se bouger jusqu’à un bureau de vote (ou de se connecter à une plateforme numérique) le moment venu.
C’est dans ce sens que va une étude en passe d’être formellement publiée dans les PNAS. Menée par l’équipe de Christopher T. Dawes, professeur associé de sciences politiques à l’université de New York et spécialiste de «génopolitique» –soit comme son nom l’indique, de l’analyse des facteurs génétiques impliqués dans les comportements politiques–, elle exploite les données de plus de 50.000 individus aux États-Unis et en Suède. Les résultats mettent en évidence qu’un score polygénique, jusqu’alors connu pour être associé avec le niveau d’études, est aussi lié avec la propension à aller voter. Une bonne partie des facteurs qui influencent ces deux prédispositions s’enracinent dans notre ADN.